Page:Gautier - Les jeunes France, romans goguenards.djvu/201

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le mari, jetant la lettre au feu et prenant une attitude des plus solennelles. — Voilà le cas que l’on doit faire des lettres anonymes.

rodolphe, sentencieusement. — C’est le parti le plus sage.

Décidément, mon pauvre Rodolphe, tu ne pourras parvenir à te procurer la plus petite péripétie ; le drame ne veut évidemment pas de toi, et il se sauve aussitôt que tu fais ton entrée ; je crains bien qu’il ne te faille rester bourgeois toute ta vie, et après ta mort, jusqu’au jugement dernier ; car ta passion d’artiste n’est, il faut bien l’avouer, qu’un menu fait de cocuage bien bête et bien commun ; un épicier, un caporal de la garde nationale ne font pas autrement les cocus.

Vrai Dieu ! la vergogne te devrait prendre d’en user de la sorte. Si j’étais toi, je me serais déjà pendu une vingtaine de fois. Il n’y a donc pas de corde, pas de fusil, pas de mortier, pas de tromblon, pas de dague, pas de rasoir, pas de septième étage, pas de rivière ! Les couturières amoureuses ont donc fait monter le charbon à un prix excessif et au-dessus de tes moyens, que tu restes là après à fumer le cigare de ta vie, comme un étudiant après avoir joué sa poule !

Ô lâche ! ô couard ! jette-toi dans les latrines, comme feu l’empereur Héliogabale, si tu trouves les autres genres de mort que je viens de te proposer trop poncifs et trop académiques.

Mon cher Rodolphe, je t’en supplie à deux ge-