Page:Gautier - Les jeunes France, romans goguenards.djvu/262

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besoin je pourrais faire une description ; remerciez-moi de ne mettre que cela, car je pourrais continuer sur ce ton pendant huit jours de suite — les heures de repas exceptées — sans que cela m’incommodât aucunement et m’empêchât de recevoir mes visites, de fumer mon cigare et de causer avec mes amis.

D’ailleurs je crois que nos drôles sont à point, et que leur conversation doit commencer à être intéressante. Je reprends le dialogue.

théodore. — C’est ici que je dois verser du vin dans mon gilet, et donner à boire à ma chemise. La chose est dite expressément page 171 de la Peau de chagrin. Voici l’endroit. Diable ! c’est précisément mon plus beau gilet, un gilet de velours, avec des boutons d’or guillochés. N’importe, il faut que le caractère soit conservé ; le gilet sera perdu. Bah ! j’en aurai un autre. (Il se verse un grand verre de vin dans l’estomac.) Ouf ! c’est froid comme le diable ; j’aurais dû avoir la précaution de le faire tiédir. Je serai bien heureux si je n’attrape pas une pleurésie. C’est joliment commode d’avoir la poitrine toute mouillée comme je l’ai !

roderick, à l’autre bout de la table. — Allons, voyons, ne fais pas la bête, mets-y un peu de bonne volonté. Tu vois bien, puisque c’est toi qui fais Bénard, qu’il faut que je te fourre une serviette dans la bouche ; il n’y a pas à alléguer que tu n’en manges pas et que c’est une viande trop filandreuse pour ton estomac. Je ne puis pas entrer dans tous ces détails : le texte est formel, voilà ton affaire,