Page:Gautier - Les jeunes France, romans goguenards.djvu/345

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Et autres gentillesses de gendarme à forçat.

Le pauvre diable se défend de son mieux ; il décline ses nom, prénoms, qualité.

— Suis-nous chez le brigadier, et marche droit, Papavoine, ou nous te mettrons les poucettes.

Il suit les deux gendarmes à cheval, allongeant le pas tant qu’il peut ; il sait que le fort de la gendarmerie n’est pas le raisonnement.

Les gamins s’attroupent ; les femmes se montrent sur le pas des portes avec leurs marmots au bras.

— A-t-il l’air féroce !

— Il doit avoir tué bien du monde. Ô le gueux ! ô le scélérat !

— C’te balle ! oh ! c’te taule !

— J’espère bien qu’on lui coupera la tronche, à celui-là.

— Je parie que je l’attrape à la sorbonne avec un trognon de chou.

Le parieur gagne : le réfractaire, furieux, veut s’élancer sur le moutard pour lui appliquer une solide correction ; mais les gendarmes le retiennent.

Au bout d’une lieue, on arrive enfin chez le brigadier, qui trouve le cas grave et renvoie le prévenu devant le commissaire. Le commissaire demeure justement une lieue plus loin et c’est encore un demi-myriamètre à faire au derrière d’un cheval : c’est agréable.

Heureusement, le commissaire est un homme de bon sens, ou à peu près ; le prisonnier se réclame de personnes connues, et le commissaire le fait mettre en liberté, non sans lui avoir débité un petit