Page:Gautier - Les jeunes France, romans goguenards.djvu/82

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de savon, les réminiscences de ses lectures, tout cela sortit pendant une heure au moins : l’atelier en était plein. Ces dames et ces messieurs se promenaient en long et en large sans se gêner le moins du monde, causant, riant, se disputant, comme s’ils eussent été chez eux.

Onuphrius, abasourdi, ne sachant où se mettre, ne trouva rien de mieux à faire que de leur céder la place ; lorsqu’il passa sous la porte, le concierge lui remit deux lettres ; deux lettres de femmes, bleues, ambrées, l’écriture petite, le pli long, le cachet rose.

La première était de Jacintha, elle était conçue ainsi

« Monsieur, vous pouvez bien avoir mademoiselle de *** pour maîtresse si cela vous fait plaisir ; quant à moi, je ne veux plus l’être, tout mon regret est de l’avoir été. Vous m’obligerez beaucoup de ne pas chercher à me revoir. »

Onuphrius était anéanti ; il comprit que c’était la maudite ressemblance du portrait qui était cause de tout ; ne se sentant pas coupable, il espéra qu’avec le temps tout s’éclaircirait à son avantage. La seconde lettre était une invitation de soirée.

— Bon ! dit-il, j’irai, cela me distraira un peu et dissipera toutes ces vapeurs noires. L’heure vint ; il s’habilla, la toilette fut longue ; comme tous les artistes (quand ils ne sont pas sales à faire peur), Onuphrius était recherché dans sa mise, non que ce fût un fashionable, mais il cherchait à donner à nos