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II


Les habitués du salon de madame Maton n’étaient pas les seuls à être vivement intrigués par le mystère qui semblait entourer la nouvelle modiste. Elle faisait les frais de toutes les conversations, et l’on construisait sur son compte mille commentaires qui s’écroulaient faute de base. On n’était sûr que d’une chose, c’est qu’elle fondait un magasin de modes. Mais d’où venait-elle ? pourquoi choisissait-elle F…, qu’elle n’avait jamais habité ? pourquoi cette pâleur, cette tristesse, pourquoi cette solitude ?

— C’est louche ! c’est louche ! se répétait-on sans cesse.

Et l’on passait plus souvent qu’il n’était nécessaire devant le magasin de l’inconnue, pour tâcher de surprendre quelque chose de sa vie.

Le magasin s’ouvrait sur la place du Marché, à peu près vers le milieu de la longueur de la rue des Bains, qui s’épanouit là en un assez large espace, carré, régulièrement pavé.

Un des côtés de la Place, celui qui continue la rue, est occupé par l’hôtel du Grand-Cerf, devant lequel s’alignent quelques arbustes dans des