Page:Gautier - Lucienne, Calmann Lévy, 1877.djvu/230

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— Non, madame, je suis née en Bourgogne ; mais j’ai fait mon apprentissage à Paris.

— Je ne m’étonne plus du goût parfait de votre travail, dit madame Dumont avec un aimable sourire.

— Ne trouves-tu pas, maman, que mademoiselle ressemble un peu à cette jeune fille qui était avec son oncle à l’hôttel des Bains ? s’écria Max. Tu sais, celle qui s’était liée avec la famille Després.

La jeune modiste eut un imperceptible tressaillement.

— Mais non, dit madame Dumont. La personne dont tu parles était blonde.

— C’est vrai, elle était blonde ! dit Max qui mit tout un monde de sentiment dans ce mot « blonde ».

Madame Maton reprit avec aménité :

— C’est une bonne fortune pour nous d’avoir une modiste de votre valeur dans notre ville, nous ne serons plus réduites à faire venir nos chapeaux de Paris sans les avoir vus et sans les avoir essayés.

— Celui que j’ai me coiffe très-mal, dit madame Dumont ; je me déciderai à vous en commander un pour mes visites du jour de l’an. Vous n’aurez pas de rivale ici ; vous aurez bientôt beaucoup d’ouvrage. Mais vous êtes toute seule, vous n’avez pas même une ouvrière.

— J’ai eu peu de chose à faire jusqu’à présent, dit mademoiselle Perrauld en souriant, et, tant que je pourrai suffire, je resterai seule. Je ne suis pas ambitieuse d’ailleurs, et pourvu que je gagne ma vie…