Page:Gautier - Lucienne, Calmann Lévy, 1877.djvu/25

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ici ? Connaissez-vous une plage plus belle que la nôtre ?

— Non, il n’y en a pas de plus belle sur les côtes de Normandie.

— Les promenades des alentours sont magnifiques.

— C’est vrai.

— Avez-vous jamais vu un établissement plus confortable, plus vaste, plus artistique que le mien ?

— Je n’ai rien à dire contre votre établissement.

— Eh bien alors ?

— Eh bien, toutes les raisons sont pour vous, et c’est justement pour cela qu’il ne vient personne.

— Comment ? je ne comprends pas, dit Duplanchet.

— Voyez-vous, mon cher monsieur, la foule ne va pas dans les endroits beaux, commodes, agréables ; elle va dans les trous où il n’y a rien à voir, où elle est mal logée, où elle mange mal. C’est une façon à elle de faire preuve d’indépendance et d’originalité.

— Vous êtes paradoxal, monsieur Lemercier ! répondit Duplanchet non sans amertume ; à force de vivre avec les livres, vous vous êtes fait sur les hommes des idées tout à fait bizarres, et vous me permettrez d’avoir de l’humanité une opinion meilleure.

Et il ajouta entre ses dents :

— Les gens du pays n’ont pas tort de dire qu’il est fou.

Puis il reprit :