Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/239

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dont nous venons tout à l’heure de crayonner les traits.

C’était un jeune Hongrois de vingt-deux ou vingt-trois ans, d’une beauté apollonienne, si souple, si dégagé, si svelte, si viril dans sa grâce féminine, que les plus robustes fatuités auraient baissé les armes devant lui. Aussi était-il le lion de Florence, — sans aucune allusion à la mauvaise gravure ainsi nommée ! — il possédait les costumes nationaux les plus merveilleux : dolmans soutachés, vestes roides de broderies d’or, bottes de maroquin semées de perles, toques constellées de diamants et surmontées d’aigrettes de héron qu’il revêtait avec une complaisance charmante dans les soirées intimes pour satisfaire la curiosité féminine et un peu sa propre coquetterie, sans doute ; coquetterie bien permise, car le costume hongrois, malgré sa profusion d’ornements, est d’une élégance héroïque et martiale qui éloigne toute idée de dandysme ridicule. Les femmes, vaincues, avouaient avec plaisir qu’elles étaient laides à côté du beau Hongrois, et que leurs plus riches toilettes de bal n’étaient que haillons comparées à ces splendides vêtements ruisselants d’or et de pierreries.

Une apparition mystérieuse intrigua beaucoup aussi, à cette époque, la curiosité cosmopolite de Florence :