Page:Gautier - Tableaux de Siége.djvu/105

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sachant pas trop si nous allions en trouver un seul vestige. A l’extérieur, rien n’était changé. La tête de la Victoire du Parthénon, dont M. de Laborde a rapporté le marbre d’Athènes, et qui figure, moulée en plâtre sur un fond de rouge antique, dans une niche circulaire, sur le mur de notre atelier, était toujours à sa place, sœur triomphante de la Vénus de Milo, force superbe de la forme, vis superba formæ, immortel idéal de beauté, divinité tutélaire du pauvre logis. Une fenêtre était ouverte, comme si la maison eût abrité encore ses anciens habitants. Cela nous parut de bon augure. Nous sonnâmes : le jardinier vint nous ouvrir, et nous entrâmes, le cœur ému, dans cette habitation, aussi petite que celle de Socrate, et qu’il n’avait pas été difficile de remplir d’amis.

Quand on pénètre dans un logis désert depuis longtemps, il semble toujours qu’on dérange quelqu’un. Des hôtes invisibles se sont installés là pendant votre absence et ils se retirent devant vous : on croit voir flotter sur le seuil des portes qu’on ouvre le dernier pli de leur robe qui disparaît. La solitude et l’abandon faisaient ensemble quelque chose de mystérieux que vous interrom-