Page:Gautier - Tableaux de Siége.djvu/316

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ment, et le cœur se serrait comme à l’approche d’une chose terrible.

La Madeleine, ce temple grec dépaysé qui prend parfois, au clair de lune, de faux airs de Parthénon, montrait sur les cannelures ébréchées de ses colonnes corinthiennes des passages de balles. Les saints et les saintes en faction sous le portique avaient reçu quelques blessures peu graves, et les lignes du monument n’étaient pas changées ; ce n’était que les cicatrices d’un combat impie, mais d’un combat. Plus loin la vraie, la sauvage, l’infernale dévastation commençait.

Dans la rue Royale, l’incendie avait continué l’œuvre des boulets et des obus. Des maisons éventrées laissaient voir leur intérieur comme des cadavres ouverts. Les planchers de tous les étages s’étaient écroulés sur les voûtes des caves. Des charpentes brûlées, des barres de fer tordues, des rampes aboutissant au vide comme les escaliers fantastiques des rêves architecturaux de Piranese, des avalanches de moellons ou de briques, de grands pans de mur où se discernait encore la configuration des appartements avec leurs papiers de tenture, leurs cheminées et quelque reste