Page:Gautier - Tableaux de Siége.djvu/76

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sûr, personne n’y entrera. Ce ne sont que terrassements, épaulement, fossés, escarpes et contre-escarpes, piéges à loups, chausse-trapes, chevaux de frise, surprises désagréables. Il faudra une bataille pour enlever chaque pouce de terre. En attendant l’assaut, les gardes nationaux, les mobiles, les francs-tireurs ont l’oreille et l’œil au guet ; ni le vent, ni la pluie, ni la boue, qui leur met des guêtres jaunes aux pieds, n’altèrent leur bonne humeur. Ils vont, ils viennent, font l’exercice, allument pour leur popote un feu auquel l’aquilon sert de soufflet, fument leurs pipes, boivent un verre d’eau-de-vie à la cantine, et ne s’inquiètent nullement des gouttes d’eau dont le goupillon de l’orage leur asperge le nez.

Au delà du rempart, on apercevait dans la campagne une tourelle à deux étages surmontée d’un sémaphore, le coteau de Sannois reconnaissable à son escarpement couleur d’ocre, et les pentes plus éloignées de Montmorency azurées par la distance.

En se retournant vers la ville on avait la perspective de grandes cours, de vastes enclos attenant à des maisons décrépites composées de pièces et de morceaux comme l’habit d’arlequin.