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heureuse.


VII

OMBRES ET LUEURS.


Revenons sur nos pas, pour retrouver nos premiers personnages laissés en arrière.

On a vu arriver George à son foyer où l’attendait la ruine, la désolation, presque la mort. Alexandrine ne le reconnaissait plus, et non-seulement il avait à pleurer sur cette intelligence éteinte, mais encore sur la perte de son enfant dont la joie de le revoir dans les bras de sa mère, à son retour, l’avait si souventes fois consolé dans ses courses lointaines. En chrétien, fortifié par les paroles et les encouragements du pasteur, il accepta la triste tâche que le ciel lui réservait, bien décidé à continuer ainsi le chemin de la vie. Sans murmurer, se dévouant pour celle qu’il aimait toujours d’un amour si fort, je serai pour elle ce que j’ai été, disait il : un cœur aimant, sincère et empressé. Je lui ferai la vie la plus douce possible, sans me laisser vaincre par les difficultés. Ma tâche est rude et pénible, je le sais ; mais elle sera adoucie par la conscience que j’aurai de faire mon devoir. N’éprouverais-je pas une indicible satisfaction en me disant : J’agis ainsi parce que j’aime, et l’amour est tout de dévouement. Et d’ailleurs, quelle joie ne ressent on pas lorsqu’on a fait un sacrifice à ceux que l’on aime.

C’est avec ces dispositions que George entreprit sa nouvelle charge. Il abandonna le rude métier de Capitaine au long cours, et avec ses épargnes qu’il mit à profit sur une bonne terre, il put espérer vivre à l’aise, tout en veillant avec soin sur sa pauvre Alexandrine. Ainsi donc il pouvait consacrer une