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— Allons, ma chère dame, que Dieu vous garde. Je vais prier pour votre petite fille Armande. Elle est toujours grasse, toujours fine.

— Toujours, mère. C’est mon George en miniature. Je l’embrasserai pour vous.

— Merci. Vite, courez chez vous ; la pluie arrive au galop.

La jeune femme se hâte et arrive à temps. La porte n’est pas plutôt fermée sur elle que l’orage éclate soudain. La pluie ruisselle partout, l’éclair semble fendre le ciel dans toute sa largeur, et le tonnerre qui gronde, sonne les vitres des croisées et retentit là bas avec force sur le bord des flots bordés de rocs à pic. Le ciel n’est plus qu’un mélange, amalgame de lumières, d’ombres, de nuages noirs opaques, épais, aux flancs remplis par l’électricité.

Au fond de la grande chambre dont les parois sont peintes en bleu, près d’un lit monumental bien blanc, un berceau d’osier attend une main accoutumée pour qu’il se mette en mouvement. Sous les flots de dentelles, une gracieuse enfant repose, chérubin tombé du ciel sur la terre, pour servir de lien intime entre le cœur de l’homme et l’âme de la mère.