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QUELQUES MÈRES
dans le beau monde

« Quelle est donc cette grosse femme qui danse ? demandai-je au Parisien qui me pilotait pour la première fois à travers le bal.

— C’est ma tante, me dit-il, une personne très-gaie, très-jeune et, comme vous le voyez à ses diamants, très-riche. »

Très-riche, très-gaie, cela se peut, pensai-je ; mais très-jeune, cela ne se peut pas. Je la regardais tout ébahi, et, ne pouvant découvrir nulle trace de sa jeunesse, je me hasardai à demander le compte de ses années.

« Voilà une sotte question, répondit Arthur, riant de ma balourdise. J’hérite de ma tante, mon cher, je ne dis point son âge. » Et voyant que je ne comprenais pas, il ajouta : « Je n’ai pas envie d’être déshérité. Mais venez, que je vous présente à ma mère. Elle a été très-liée autrefois avec la vôtre, et elle aura du plaisir à vous voir. »

Je suivis Arthur, et auprès d’un buisson de camélias nous trouvâmes deux jeunes personnes assises au milieu d’un groupe de papillons mâles plus ou moins légers. Arthur me présenta à la plus jeune, du moins à celle qui me parut telle au premier coup d’œil ; car elle était la mieux mise, la plus pimpante, la plus avenante et la plus courtisée des deux. J’étais encore étourdi par les lumières et la musique, par mon début dans le monde de la capitale, par la crainte d’y paraître gauche, et pro-