LA DUCHESSE, vivement. Cet homme, quel est-il ? Parlez.
Mlle HÉBERT. C’est…
LA DUCHESSE. Parlez donc ! vous me faites mourir.
Mlle HÉBERT. Et voilà ce que je crains vraiment. Calmez-vous, madame ; sinon, je ne vous dirai pas que cet envoyé mystérieux est…
LA DUCHESSE, frémissant. Mais qui donc, mon Dieu !…
Mlle HÉBERT. Le valet de chambre…
LA DUCHESSE. Du roi ?
Mlle HÉBERT. Oui, Lebel lui-même… et voici le billet qu’il m’a chargé de remettre à madame.
LA DUCHESSE, saisissant le billet et l’ouvrant précipitamment. C’est de lui ! ô ciel ! ma vue se trouble… les larmes… je ne peux lire !…
Mlle HÉBERT, ramassant le billet. Lisez, lisez, madame ; ces mots-là vous rendront la vie.
LA DUCHESSE, lisant. « Un coupable qui pourtant vous est resté fidèle se rendra en secret, dans une heure, à votre porte… Daignerez-vous le recevoir ?… Peut-il espérer son pardon ?… » Ah ! qu’il vienne et tout est oublié.
Scène XI.
LA DUCHESSE. Je vais le voir ! mes amis… Ô mon Dieu ! il me semble que mon cœur bat trop vite pour aller jusque-là… C’en est trop pour ma raison, pour ma vie, peut-être. Ah ! si c’était une dérision du ciel !… Si tant de bonheur ne m’était offert que comme un piége… Si l’adresse de mes ennemis… les menaces du grand aumônier… si sa crainte… sa faiblesse, allaient le détourner… Mais ces mots, écrits de sa main, ce n’est point une illusion… il me demande grâce… il m’aime encore. Oui ! j’aurai la force de le voir, de lui parler et l’entendre. Je ne sais ce que j’éprouve, c’est là… je sens… c’est le bonheur… la surprise… la joie… Il va venir… les portes s’ouvrent, oui, j’entends marcher… Si c’était lui… courons. Ah ! je ne puis me soutenir.
Elle retombe accablée sur le canapé. Pendant cette tirade, ses amis l’entourent avec une tendre sollicitude, ils la soutiennent.
Scène XII.
TOUS. Le roi !
LA DUCHESSE. Louis !
LE ROI, se précipitant aux genoux de la Duchesse. Marianne, est-il vrai ? tu m’aimes toujours ?…
LA DUCHESSE, paraît également agitée par la joie et par une vive souffrance. Ah ! plus que jamais !…
LE ROI, avec terreur. Mais ton front pâlit… tes yeux s’égarent… Ils me cherchent sans me voir… Marianne je suis là… Reviens à toi… Grand Dieu !… ses mains sont glacées… Elle respire à peine… Marianne… Elle se meurt ! au secours…
Scène XIII.
mourante, LA DUCHESSE DE LAURAGUAIS, LE DUC DE RICHELIEU, DUVERNEY, Mlle HÉBERT,
GERMAIN, DES GENS DE LIVRÉE.LA DUCHESSE, d’une voix mourante. Cher Louis… ne me plains pas… Tu m’aimes toujours… Ah ! je meurs de joie… Oui… de joie.