Page:Gazette des Beaux-Arts, vol 32 - 1904.djvu/246

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LE PORTRAITISTE AVED ET CHARDIN PORTRAITISTE
(DEUXIÈME ARTICLE[1])


Les figures d’hommes aux traits énergiquement accentués dans une carnation copieusement épanouie étaient les modèles qui convenaient le mieux à la facture d’Aved, née des vigoureux exemples des Flamands et des Hollandais. Il semblerait que son pinceau fût au contraire un peu lourd et englué pour traduire le fard et le piquant des minois féminins de l’époque. Il eut cependant plusieurs commandes de grandes élégantes du temps.

En 1736, Catherine de Seyne, actrice tragique de la Comédie-Française, devenue la femme de Quinault-Dufresne, se voit, dans le plein éclat de ses jeunes années, contrainte par sa santé délicate de quitter définitivement le théâtre. Elle charge Aved de la représenter dans le rôle de Didon, d’une tragédie de Le franc de Pompignan, celle de ses créations qui lui a valu son plus franc triomphe. La pièce, d’ailleurs médiocre, une des premières productions de l’auteur, avait remporté un certain succès, attribuable aux belles qualités qu’y avait développées l’interprétatrice. Aved peint son séduisant modèle selon le même esprit que Coypel avait figuré Adrienne Lecouvreur, et Nicolas de Largillière la Duclos[2].

  1. V. Gazette des Beaux-Arts, 1904, t. II, p. 90.
  2. L’Adrienne Lecouvreur de Coypel, représentée, comme on sait, en Cornélie portant l’urne qui renferme les cendres de Pompée, semblerait même avoir fait