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histoire du mouvement janséniste

comme si ce genre d’acceptation n’avait pas été irrévocablement condamné ; puis il mit sur pied un projet d’accommodement. Il fit dresser par le procureur général Daguesseau, qui devint chancelier très peu de temps après, des mémoires demeurés inédits, qui sont des chefs-d’œuvre de science juridique et de haute raison ; il pesa de toutes ses forces sur Noailles, dont on ne pouvait absolument pas se passer, et le cardinal, qui n’a jamais pu se résoudre à marcher droit, se serait sans doute prêté à cette combinaison. Mais l’opinion publique se dressa devant lui avec une force irrésistible ; il fut arrêté par les objurgations des curés de Paris, du clergé des paroisses, des communautés du diocèse. On lui déclara de toutes parts que, les propositions condamnées par Clément XI étant la pure doctrine de l’Écriture Sainte et des Pères de l’Église, il était absolument impossible de recevoir la Bulle Unigenitus. La Sorbonne même alla en corps, le 12 janvier 1717, déclarer à l’archevêque qu’elle lui serait inviolablement attachée tant qu’il serait attaché lui-même, par son refus de recevoir la Bulle, « à la vérité, à l’Église et à la patrie » ; c’est ce que vinrent lui déclarer cent cinquante docteurs. On lui écrivit de tous côtés des lettres qui sont imprimées et qui sont d’une extrême vivacité[1]. Noailles tint ferme malgré lui, et dans ces conditions le projet du Régent ne put aboutir, les conférences furent rompues en février 1717, et c’est alors, le 5 mars, que se produisit l’appel au futur concile interjeté par les quatre évêques de Montpellier, de Boulogne, de Mirepoix et de Senez. L’affaire de la Bulle entrait dans une phase toute

  1. V. les Anecdotes ou Mémoires secrets de Villefore, le Journal de Dorsanne, et une infinité de publications du temps.