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chapitre xiv

à tous égards une œuvre très remarquable[1]. La première partie de cette Instruction est un excellent morceau d’histoire religieuse ; on y trouve tout ce qui vient d’être rapporté dans ce chapitre sur la Bulle et sur le Formulaire ressuscité, et Soanen prend ensuite contre l’évêque de Saintes la défense des douze articles de Noailles et de Benoît XIII, qui avaient, comme on l’a vu, éprouvé le triste sort de la Bulle de Paul V contre Molina en 1608. Enfin l’évêque de Senez saluait par avance le jour heureux qui verrait le triomphe de la Vérité et celui de l’Église. Cet opuscule n’avait rien de subversif ; il était plus modéré que les Instructions pastorales de Noailles et que les écrits de Colbert, et il ne ressemblait en rien aux libelles que publiaient les Bissy, les Rohan, les Languet de Gergy. Mais il fallait châtier en la personne du petit évêque de Senez les évêques de Montpellier et de Bayeux dont il était le complice ; les partisans de la Bulle n’y manquèrent pas. On obtint du roi l’ordre de tenir un concile provincial à Embrun, dont l’archevêque était alors l’odieux sentin, digne émule de feu le cardinal Dubois. Soanen y fut convoqué comme ses comprovinciaux par une lettre officielle, et il apprit en route que le concile se réunissait pour le condamner. Il protesta, il récusa le tribunal comme incompétent et son président comme notoirement indigne. Naturellement on ne tint aucun compte de son opposition ; on fit venir pour compléter le tribunal des évêques voisins, et parmi eux le célèbre Belsunce, évêque de Marseille, dont ce n’était certainement pas la place, car il avait attaqué personnellement Soanen. En un mot toutes les règles de la justice et de l’équité furent

  1. Un petit volume in-12 de 140 pages.