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histoire du mouvement janséniste

était qu’il fallait sans retard nommer des examinateurs. Mais cette motion se heurta à des résistances que Cornet n’avait pas prévues : soixante-dix docteurs percèrent à jour l’intrigue des molinistes, et ils appelèrent comme d’abus de tout ce que le syndic avait fait au mépris des réglements et des traditions, Le Parlement reçut leur appel, et le président Molé imposa silence aux deux partis.

Ces débuts de l’affaire des cinq propositions peuvent suggérer quelques réflexions que n’ont point faites les historiens de Port-Royal. Puisqu’il s’agissait en 1649 d’une simple censure de Sorbonne, pourquoi Cornet et ses associés ne se sont-ils pas attaqués directement aux apologies de Jansénius composées par le docteur Antoine Arnauld, l’homme qu’ils voulaient abattre ? Était-il donc impossible d’y trouver une proposition censurable, sauf à condamner, comme on l’a fait en 1655, deux Pères de l’Église à la fois ? Pourquoi n’avoir pas tiré de l’Augustinus même une demi-douzaine de citations textuelles facilement vérifiables ? Nicolas Cornet a fait croire à Bossuet, qui le redisait encore en 1700, qu’il ne faut pas demander où sont les cinq propositions, mais qu’il faut plutôt demander où elles ne sont pas car elles sont l’âme du livre, et le livre n’est pas autre chose que les propositions elles-mêmes. S’il en est ainsi, rien n’était plus facile que d’extraire d’un si mauvais livre des citations condamnables. Mais ici la réponse est facile le docteur Habert avait en 1644 extrait de l’Augustinus huit propositions textuelles qu’il voulait faire condamner à Rome ; mais Arnauld les avait reprises une par une, et à la grande confusion du dénonciateur, il avait démontré que ces huit propositions étaient parfaitement catholiques selon les termes et le sens de Jansénius. On jugea