Page:Gazier - Histoire générale du mouvement janséniste, depuis ses origines jusqu’à nos jours, tome 2.djvu/10

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’arriver à des compromis mais le fameux corps de doctrine élaboré en 1720 par une centaine de prélats des deux partis ne pacifia pas l’Église de France. Après comme avant la Déclaration qui était l’œuvre de Dubois, il y eut parmi eux des acceptants fougueux et intolérants d’autres n’acceptèrent que conditionnellement, d’autres enfin refusèrent de la manière la plus absolue. On a vu dans les chapitres précédents le rôle des uns et des autres ; Bissy évêque de Meaux et successeur immédiat de Bossuet, le cardinal de Rohan, évêque de Strasbourg, le cardinal de Mailly, archevêque de Reims, l’ancien jésuite Belsunce, évêque de Marseille et l’invraisemblable Languet de Gergy, évêque de Soissons et ensuite archevêque de Sens, furent à la tête de ceux qui voulaient assurer à tout prix le triomphe de la Bulle. Les appelants reconnaissaient pour chefs les quatre premiers d’entre eux Colbert, La Broue, de Langle et Soanen, et à la tête du tiers parti se trouva longtemps le cardinal de Noailles, archevêque de Paris.

À dater de 1726, et durant les dix-sept années qui suivirent, la France fut gouvernée par un évêque, le cardinal Fleury, (1653-1743) qui exerça sans en avoir le titre les fonctions de premier ministre, et qui sous une apparence débonnaire fut un despote. Quarante mille lettres de cachet expédiées sous son ministère montrent le cas qu’il faisait de la liberté individuelle. Ancien évêque de Fréjus et nommé par Louis XIV précepteur de Louis XV, Fleury avait soixante-treize ans quand il remplaça en 1726 le duc de Bourbon disgracié. Il adopta la politique religieuse du Régent, et fit de l’acceptation de la Bulle Unigenitus une question de principe et une affaire d’État. Ce n’était pas le fanatisme qui le faisait agir, car il avait dans sa jeu-