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LE MALENCONTREUX.

ses torts et ses travers. Elle fut ma seule garde, passa cinq nuits de suite au chevet de mon lit, et me rendit les soins les plus utiles et les plus tendres. Cet événement lui donna sur moi de justes droits ; elle ne le sentit que trop, et elle en abusa sans aucun ménagement ; elle devint chez moi, non-seulement maîtresse, mais tyran. Nous changions sans cesse de servante ; madame D***, très-difficile à servir, n’en pouvoit garder une plus de huit jours ; en outre, madame D*** ayant fait beaucoup de visites dans le voisinage, attiroit chez moi ses nouvelles connoissances, et m’obligeoit à les recevoir. L’hiver d’ensuite elle fit plus ; elle invita ses amis à dîner chez moi : elle m’engageoit ainsi dans des dépenses que j’étois hors d’état de soutenir. La moindre représentation de ma part excitoit sa colère ; elle s’emportoit ou me boudoit. Je résistois avec foiblesse, je cédois avec dépit. Ces scènes désagréables se renouveloient tous les jours. Madame D*** faisoit entendre adroitement à ses amis, que je l’avois secrètement épousée : tout le