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LE MALENCONTREUX.

Quelques petits accidens nous ayant arrêtés en route, nous n’arrivâmes à Pageroë qu’à onze heures du soir. Tout le monde étoit couché dans les hameaux dispersés autour de mon habitation. Quand nous fûmes près de ma maison, je descendis de voiture, pour aller frapper à la porte, et, pendant plus de dix minutes ce fut en vain, personne ne répondit : je ne me lassai point, je frappai avec une nouvelle force, j’appelai, je criai à tue-tête ; enfin une fenêtre s’ouvre, et, à la clarté de la lune, je vois paroître un gros homme qui, d’un ton de colère, me demande en françois à qui j’en veux ; ma surprise fut extrême ; cependant je répliquai que je voulois entrer chez moi : Allez, me dit le gros homme, vous êtes ivre, ou bien vous êtes fou. En prononçant ces paroles, il referma la fenêtre, et j’eus beau frapper encore et tempêter, on ne répondit plus. Confondu, consterné, je retournai à la voiture : M. Merton s’indignoit, Lucy rioit, j’étois désespéré : nous tînmes conseil, et il fut décidé que nous irions