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LE MALENCONTREUX.

il mouroit d’envie de se trouver seul avec moi, afin de me parler sans contrainte. Il pria plus d’une fois Lucy d’aller voir si rien ne manquoit à mon appartement ; enfin, Lucy sortit : alors, M. Merton rapprochant de moi sa chaise : Mon ami, s’écria-t-il, elle est à vous, oh ! pour cette fois, elle est à vous. — Vous l’a-t-elle dit ? — Positivement ; elle m’a permis de vous en instruire ; mais elle vous prescrit là-dessus un silence absolu, jusqu’à l’époque où son deuil sera fini, c’est-à-dire dans cinq mois. Ah ! si vous saviez combien de fois, au fond de l’ame, elle s’est repentie de ne vous avoir pas préféré à ce mauvais sujet qui lui a causé tant de peine….. Long-temps avant la mort de Florzel, elle avoit cessé de l’aimer ; mais quand elle sut que l’on craignoit pour sa vie, elle vola près de lui ; elle l’a soigné, pendant six mois, avec une affection et une assiduité dignes des plus grands éloges : elle est opiniâtre, romanesque, parfois un peu fantasque, mais c’est une excellente créature ; son ame est pure, généreuse et sensible.