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bout d’une lance jusque dans le camp des prétoriens, à la vue d’un peuple consterné.

Nous allons voir maintenant quinze mille prétoriens décider du sort de l’empire. Auguste les avait institués et Tibère les plaça dans un camp fortifié qui dominait toute la ville. Ils ne tardèrent pas à comprendre que la personne de l’empereur, l’autorité du sénat, le trésor public et le sort de l’empire étaient entre leurs mains. Après le meurtre de Pertinax, les prétoriens coururent sur les remparts et annoncèrent à haute voix que l’univers romain serait adjugé dans une vente publique au dernier enchérisseur.

Didius Julianus, sénateur opulent, propose quatre mille six cent livres par chaque soldat ; Sulpicianus, gendre de Pertinax, n’en avait offert que trois mille six cent quatre-vingts. Les portes du camp s’ouvrent devant Julianus, il est revêtu de la pourpre et reçoit le serment de fidélité des troupes. Du camp il se rend au sénat, vante la liberté de son élection : toute l’assemblée lui répond par des acclamations, exaltant son bonheur et celui de Rome, et il est revêtu des marques de la dignité impériale et conduit au palais, où il peut voir en entrant le corps sanglant de Pertinax. On lui donne une fête, et il joue aux dés bien avant dans la nuit et assiste aux danses du célèbre Pylade. Il ne put pas dormir. Il avait raison de craindre. Claudius Albinus, Pescenninus Niger et Septime-Sévère commandaient les armées de Bretagne, de Syrie et de Panonnie. Albinus était en Bretagne, Niger en Syrie, Sévère en Panonnie. Les Chrétiens ne prirent aucune part à tous ces mouvements. « Il n’y avait parmi eux, dit Tertullien, ni albiniens, ni nigriens. » Bossuet ajoute : « Les usurpateurs de l’empire ne trouvaient point de partisans parmi les Chrétiens, et ils servaient toujours fidèlement ceux que Rome et le sénat avaient reconnus. »

Sévère est déclaré empereur sur les bords du Danube ; il lui fallait faire une marche de deux cent soixante-six lieues pour paraître à la vue de Rome. Il promet à ses soldats neuf mille livres, le double de ce que Julianus avait donné aux préto-