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— Ce que vous appelez science n’est-ce pas un mot générique qui s’applique à différentes choses ? Ainsi, vous direz d’un homme qui possède un art, qu’il en a la science : par exemple, on dira de lui qu’il a la science du commandement, la science du gouvernement, la science de la médecine. Mais pour les choses qui concernent Dieu et l’homme, existe-t-il une science qui les fasse connaître, qui montre ce qu’elles ont de juste et de divin ?

— Assurément, lui dis-je.

— Quoi donc ! il serait aussi facile de connaître Dieu et l’homme que la musique, l’arithmétique, l’astronomie ou quelque autre science semblable ?

— Oh non ! lui dis-je.

— Vous n’avez donc pas bien répondu à ma question, reprit-il. Certaines connaissances exigent de l’étude et du travail, d’autres ne demandent que des yeux. Si l’on vous disait qu’il existe dans l’Inde un animal qui ne ressemble à aucun autre, qu’il est de telle ou telle manière, de plusieurs formes, de diverses couleurs, avec tout cela vous ne sauriez pas ce qu’il est, si vous ne le voyiez de vos yeux, et vous n’en pourriez raisonner si vous n’en aviez jamais entendu parler à quelqu’un qui l’ait vu ?

— Bien certainement, lui dis-je.

— Comment donc les philosophes peuvent-ils avoir une idée juste de Dieu, ou affirmer quelque chose de vrai sur son être ; car ils ne le connaissent pas, puisque ni leurs yeux, ni leurs oreilles n’ont rien pu leur en apprendre ?

— Mais, lui répondis-je, on ne peut voir Dieu des yeux du corps comme les autres êtres. L’esprit seul peut le concevoir, ainsi que l’enseigne Platon, dont je professe la doctrine.

— Mais, reprit le vieillard, dites-moi ce que vous pensez de l’âme. Saisit-elle plus vite les objets que ne le fait l’œil du corps, ou bien peut-elle voir Dieu sans le secours de l’Esprit saint ?

IV. — Platon nous dit que l’œil de l’âme est doué d’une pénétration si vive, qu’avec lui, et c’est aussi pour cet usage qu’il nous a été donné, nous pouvons voir l’être par excellence, l’auteur de toutes les choses intellectuelles, qui n’a lui-même