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plus sujet de s’en moquer. Mais laissons là cette discussion. Je veux bien vous accorder tout ce que vous avancez. Répondez à une autre question : Quand est-ce que l’âme voit Dieu ? est-ce pendant qu’elle est unie au corps, ou lorsqu’elle en est séparée ?

— Lors même qu’elle est enfermée sous cette enveloppe matérielle, lui répondis-je, elle peut déjà embrasser Dieu par la pensée ; mais c’est surtout quand elle sera délivrée de sa prison et rendue à toute sa liberté, qu’elle jouira complettement et pour toujours de l’objet aimé.

— Rentrée dans l’homme, se souvient-elle de ce qu’elle a vu ?

— Je ne le pense pas.

— À quoi lui sert-il donc d’avoir vu Dieu ? Quel avantage a-t-elle sur l’âme qui ne l’a pas vu, si elle ne se souvient même pas d’avoir vu ?

— Je ne saurais ici vous répondre.

— Mais quelles peines souffrent les âmes qui ne sont pas jugées dignes de voir Dieu ?

— Elles sont enfermées dans le corps de quelques bêtes comme dans une prison. Tel est leur châtiment.

— Mais savent-elles pour quelle raison on les enferme dans ces nouveaux corps, leur a-t-on dit que c’était pour les fautes qu’elles avaient commises ?

— Je ne pense pas qu’elles le sachent.

— Alors le châtiment me paraît inutile ; je pourrais même dire qu’elles ne sont pas punies, si elles ne savent pas que c’est ici un châtiment ?

— Non, sans doute.

— Ainsi donc ces âmes ne voient point Dieu ; elles ne passent pas non plus dans d’autres corps, car si elles y étaient envoyées elles sauraient que c’est une punition, et elles craindraient désormais de commettre la plus légère faute. Ce que vous dites d’ailleurs qu’elles ont l’idée de Dieu, qu’elles savent qu’il est beau de pratiquer la justice, la piété, je l’admets avec vous.

— Vous avez raison, lui dis-je.