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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

CHAPITRE XI.
Pour parvenir à la véritable connaissance de Dieu, il faut nous détacher de la matière. Le Paganisme lui-même donne ce précepte.

Un sacrifice de bonne odeur pour Dieu, c’est de nous séparer sans retour du corps et de toutes les affections charnelles. De culte véritable et solide il n’y en a pas d’autre. N’est-ce pas là ce qui a inspiré ces sages paroles à Socrate ? « La philosophie est la méditation de la mort. » En effet, n’admettre dans le travail de la pensée, ni l’intervention de la vue, ni celle d’aucun autre sens, mais appliquer à l’examen des choses la vision de l’intelligence, dégagée de toute influence étrangère, n’est-ce pas être dans la voie de la philosophie véritable ? Voilà quel était le but de ce silence de cinq ans que Pythagore prescrivait à ses disciples, afin que détournés du monde de la matière, ils contemplassent la Divinité uniquement avec le regard de l’esprit. Traditions merveilleuses, mais qui sont autant de larcins faits à Moïse par les philosophes les plus éclairés ! « La peau de l’holocauste enlevée, dit le législateur des Hébreux, tu en couperas les membres. » C’est qu’après avoir dépouillé de l’enveloppe matérielle l’âme qui possède la connaissance, une fois libre des chimères corporelles et des passions qu’enfantent les opinions vaines et mensongères, délivrée enfin de tous les désirs charnels, il faut la consacrer à la lumière. Mais la plupart des hommes, s’enveloppant de la matière, comme les limaçons de leurs coquilles, et se roulant dans leurs passions charnelles comme les hérissons sur eux-mêmes, n’ont pas de la Divinité, l’être bienheureux et incorruptible par excellence, des pensées plus relevées que s’il s’agissait de l’homme. Bien qu’ils soient nos frères, ils ignorent que Dieu nous a départi une foule de choses qu’il ne partage point avec nous. Il nous a donné par exemple la naissance, bien que lui-même n’ait jamais été engendré ; la nourriture, bien qu’il n’ait pas besoin d’aliment ; l’accroissement, quoiqu’il demeure immuable ; une heureuse vieil-