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VIE

DE SAINT CYPRIEN

ÉVÊQUE DE CARTHAGE, DOCTEUR
ET MARTYR.
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Carthage, plusieurs fois rebâtie depuis la guerre terrible qu’elle avait soutenue contre les deux Scipions, avait repris une grande splendeur sous la conquête romaine, et continuait de commander au vaste territoire sur lequel elle dominait lorsqu’elle formait un empire distinct. Un proconsul la gouvernait, mais en respectant ses libertés municipales et son sénat, qui était vénéré de toute l’Afrique. Florissante jadis par le commerce, le commerce alimentait encore sa magnificence. Il n’était bruit que de la beauté de ses édifices ; ses quais, son port, ses rues excitaient l’admiration des étrangers. La multitude se pressait dans des temples de marbre, d’où l’on avait banni les sacrifices humains et la dévorante statue de Saturne, il est vrai ; mais, pour dédommager la colonie de cette perte, la métropole lui avait bâti des cirques et des amphithéâtres, elle lui formait des gladiateurs, et lui envoyait des édits de mort contre les Chrétiens. La langue et les institutions étaient devenues romaines ; le sang et l’idiome puniques avaient fui aux extrémités de l’empire, reculant, autant qu’ils l’avaient pu, devant la conquête politique et morale. L’amour des lettres, à peu près étranger à l’antique Carthage, s’implanta profondément dans la Nouvelle. Grâce au mélange des deux races, ces vives imaginations de l’Afrique se passionnèrent pour les arts de la Grèce avec un enthousiasme ardent,