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VIE DE SAINT CYPRIEN.

gnaient encore, c’était envenimer le mal, et qu’une paix imprudente, au lieu de guérir cette multitude de blessés, ne servirait qu’à hâter leur mort.

Ce zèle rigide néanmoins savait fléchir à propos. On entrait dans l’été, saison toujours redoutable en Afrique, à cause de ses chaleurs dévorantes et des maladies qu’elles amenaient. Il écrivit à son clergé pour l’avertir que, si les pénitents, recommandés par les martyrs, se trouvaient en péril de mort ou surpris par quelque danger imprévu, il fallait les renvoyer au Seigneur, couverts de la paix de l’Église et du pardon de leurs fautes, après une confession publique. Il recommandait avec le même intérêt le soin des catéchumènes ; il voulait que l’eau baptismale ne frustrât point l’espérance de ceux qui touchaient à leur fin.

La persécution, après plusieurs phases de sommeil ou de colère, épargnant aujourd’hui, frappant le lendemain, quelquefois distraite de ses cruautés par les premières invasions des Barbares ou du moins par le retentissement lointain de leurs armes, se ralluma avec une nouvelle fureur en Afrique. C’était la dernière éruption du volcan. Il faut rapporter à cette période la chute de quelques prêtres, qui apostasièrent parmi les instruments de mort. Une révélation consolante annonça néanmoins à l’évêque de Carthage que les malheurs de l’Église allaient finir. Prophète des vengeances, il était juste qu’il publiât les miséricordes. Une voix lui dit : « Rassure le peuple ; le temps marqué pour la paix est proche ; si elle tarde encore, c’est qu’il reste quelques fidèles à éprouver. » Pour hâter ce bienheureux moment, il recommanda instamment au peuple et au clergé fidèle les larmes, les jeunes, les œuvres de miséricorde et tout ce qui pouvait désarmer la colère du Seigneur. Il insista principalement sur les prières, et les prières unanimes, parce que, disait-il, il y a longtemps que la divine miséricorde aurait exaucé nos demandes, ou plutôt nous n’aurions pas été battus par la tempête, si nous n’avions eu tous qu’un sentiment et qu’une volonté.