Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 5 bis.djvu/88

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sillanimité humaine, était véritablement une inspiration divine. Une persécution, plus terrible qu’il n’en fut jamais, s’alluma et porta le ravage parmi la tribu de Dieu[1]. L’ennemi du salut ne pouvait se flatter que tous tomberaient dans le même piége ; il recourut donc à des artifices divers ; tout combattant inattentif et qui manquait de vigilance, il le terrassait infailliblement, celui-ci, par une adroite manœuvre, celui-là, par un autre stratagème. À des blessés de plus d’un genre, il fallait un médecin expérimenté qui appliquât les célestes remèdes selon la nature de leurs plaies ; tantôt les adoucissantes fomentations, tantôt le scalpel sans pitié. Un homme dont la qualité distinctive était un heureux mélange de modération et de vigueur, un homme qui, au milieu des orageuses collisions du schisme, sut gouverner le vaisseau de l’Église dans des routes assurées, fut tenu en réserve. Ne reconnaissez-vous point là, je vous prie, l’action de la Providence ? Dieu n’est-il pour rien dans cette combinaison ? La mette sur le compte du hasard qui voudra ! L’Église crie à haute voix : « Les hommes nécessaires ne sont pas mis en dépôt pour l’avenir sans un décret de la Divinité. » Telle est ma doctrine et ma croyance.

9. Allons plus avant, si bon vous semble. À la suite de la persécution, éclata une contagion affreuse, dévorante, qui emportait tous les jours par de brusques accès de nombreuses victimes, et envahit successivement des familles tout entières. Partout la terreur, partout la fuite pour échapper au fléau ! On abandonne impitoyablement ses proches ; on les jette hors des maisons, comme si, avec ce pestiféré prêt à mourir, on pouvait chasser en même temps la mort. Des milliers de corps, je me trompe, des milliers de cadavres gisent tristement dans les rues, sollicitant la pitié et les secours du passant par l’aspect du sort qui l’attend lui-même. Mais rien pour la miséricorde ! On ne songe qu’à des gains sacriléges ; pas un cœur qui tremble à la vue de son péril ! pas un qui donne à ses frères l’assistance qu’il aurait souhaitée pour lui-même ! Que fait dans cette calamité

  1. Sous l’empereur Dèce.