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dans la pratique. Pline ne mentionne les tuyaux de terre cuite que pour les conduites sans pression. « Quam sur gère in sublime opus fierit, dit-il, plumbo veniat. » (Histoire naturelle XXXI, 31.). M. Lanciani cite un certain nombre d’exemples de conduits en terre découverts en Italie[1] : aucun n’a appartenu à un siphon. Ce devait, au temps de Vitruve, être déjà exceptionnel. Pour la traversée des vallées profondes, les Romains ont dû n’employer que le plomb, à cause de sa résistance bien supérieure.

Siphon d’Alatri. — Une discussion est depuis longtemps engagée en Italie sur l’authenticité d’un siphon établi par le censeur Betilienus Varus (an de Rome 620, 1.34 avant J.-C.) au voisinage d’Alatrium (Alatri)[2]. Le P. Secchi, dans un article publié en 1865[3], avait indiqué la présence de l’aqueduc à la hauteur de la ville, à 101m,12 exactement au-dessus du niveau d’un pont sur lequel ce même aqueduc devait passer, selon lui ; il en concluait à l’existence d’une conduite forcée. Ayant découvert les fragments d’un énorme tuyau de terre cuite (tubo fittile) d’un diamètre intérieur de 0m,345 avec une épaisseur de 0m,061, il pensait pouvoir y reconnaître le tuyau du siphon. Cette opinion a été vivement attaquée dans un rapport de M. l’ingénieur di Tucci, publié par les Notizie degli Scavi (1879). Cet ingénieur croit d’abord que l’eau, sous une pression pareille, aurait filtré à travers les pores de la terre cuite, malgré tout le soin avec lequel cette matière aurait été comprimée. Il établit ensuite, en adoptant le coefficient de résistance donné par Coulomb pour la brique, qu’un semblable tube ne pourrait faire équilibre qu’à une pression maxima de 6,61 atmosphères, et que, même en supposant la conduite noyée dans un massif de béton, jamais elle n’aurait résisté à une charge de 100 mètres d’eau. Il va jusqu’à contester l’authenticité de la découverte, ou tout au moins de son emplacement.

Mais ce n’est pas tout. M. di Tucci s’engage dans un raison-

  1. Ouvr. cité, p. 187 suiv.
  2. Petite ville, actuellement de 5 à 6.000 habitants, située à 23 kilomètres au nord de Frosinone, soit à une vingtaine de lieues à l’est de Rome.
  3. Intorno alcuni avanzi di opere idrauliche autiche rinvenuti nella città di Alatri. (Bullet. Instit. 1860, p. 65).