Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/127

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ne l’avois pas cru ? Paresseux et sans expérience, que pouvez-vous faire de mieux, cher Prince ? Comment ne pas vous confier à un homme amoureux de votre gloire et de celle des deux empires ? Il vous manque si peu de choses pour que vous soyez une perfection ! Mais que peut faire votre génie s’il n’est pas aide par la confiance et l’amitié ?

Le prince me dit : — Faites passer la Save à votre Empereur, je passerai le Bog. — Comment pouvez-vous, lui dis-je, en être aux complimens comme à la porte d’un sallon ? Mon Empereur vous cède le rang ; il y a une armée turque contre lui, il n’y en a pas contre vous. — Croyez-vous, me dit-il, qu’il voudroit nous donner des croix de Marie-Thérèse, et recevoir des croix de St. Georges pour ceux qui se distingueroient dans nos deux armées ? — J’ai bien vu où il en vouloit venir. Il a la manie des ordres ; il n’en a que douze, et je lui ai assure qu’Oczakow valoit bien notre grande croix, et que s’il rendoit la prise de Belgrade plus facile à Votre Majesté Impériale, il pourroit prétendre à l’ordre de St. Etienne. Je vous prie, Sire, de confirmer cette espérance que je lui ai donnée ; et si notre catholicité romaine pouvoit se déranger en sa faveur, et lui permettre la toison, nous l’aurions tout-à-fait à nous.