Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/185

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Quelle est donc sa magie ? Du génie, et puis du génie, et encore du génie : de l’esprit naturel, une mémoire excellente, de l’élévation dans l’ame, de la malice sans méchanceté, de la ruse sans astuce ; un heureux mélange de caprices dont les bons momens, quand ils arrivent, lui attirent les cœurs ; une grande générosité, de la grâce et de la justesse dans ses récompenses ; beaucoup de tact, le talent de deviner ce qu’il ne sait pas, et une grande connoissance des hommes.

Je vois un cousin de l’Impératrice[1] qu’on croiroit le plus mince officier de son armée, à sa modestie et à sa simplicité sublime : il est tout, et ne veut rien paroître ; il réunit tous les talens, toutes les qualités imaginables ; amoureux des coups de fusil et de ses devoirs ; s’exposant une fois plus qu’il ne le doit ; faisant valoir les autres, leur attribuant ce qui lui est dû ; plein de délicatesse dans l’ame et dans l’esprit ; du goût le plus fin et le plus sûr ; aimable, doux, ne laissant rien échapper ; prompt à la repartie et à la conception ; rigide dans ses principes ; indulgent pour moi seul, mais sévère pour lui et pour les autres ; prodigieusement instruit, enfin un véritable génie pour la guerre.

  1. Le Prince d’Anhalt-Bernbourg.