Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/240

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s’appesantira pas sur nous ; il n’appartient pas à tout le monde d’être magnifique. Il y a des pays où l’on peut, dans sa cour et dans ses armées, réunir l’or des Perses au fer des Macédoniens ; mais quand on ne peut se soutenir qu’en ressemblant à Sparte, on a tort d’avoir cent chariots de bagages et deux troupes de comédie, qui me font croire que les autres troupes ne serviront point à la tragédie héroïque.

Je demande pardon à Votre Majesté Impériale de l’entretenir de ma douleur qui est bien vive. J’apprends dans ce moment la perte que nous faisons. Le Maréchal de Laudon vient de mourir dans son quartier de Neutisschein, à une lieue du mien, après des souffrances terribles, dont j’ai été témoin pendant onze jours de suite. Il y a eu un mieux qui nous rend notre malheur encore plus sensible. Faut-il qu’un héros, et même un grand homme, sans avoir fait de mal qu’aux ennemis, souffre tant, et disparoisse ensuite de cette terre qu’il a tant honorée ! Je veux penser bien vite au bonheur que j’aurai, quand les circonstances me permettront de me mettre aux pieds de Votre Majesté Impériale, pour écarter toutes ces idées affligeantes pour l’humanité.

J’attends à tout moment, de la Baltique ou de ses bords, des nouvelles d’une victoire et