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D’abîmes…
« Ce n’était donc le monde, mais l’antique matière
Dont il devait sortir la riche pépinière
Des beautés de ce tout…

Et voici, quand le poète a dit la naissance de la lumière, de larges vers doux et émus à la lénitive Nuit :

« La nuit est celle-là qui charme nos travaux.
Ensevelit nos seins, donne trêve à nos maux.
La nuit est celle-là qui de ses ailes sombres
Sur le monde muet fait avecque les ombres
Dégoutter le silence et couler dans les os
Des recrus animaux, un merveilleux repos. »

Elle avait, auparavant, venant de dire la terre sortie d’entre la ténèbre primordiale et les sursauts d’éclairs, évoqué de quelques vers les spectacles de nature qui n’étaient pas encore, qui seraient au large des horizons :

 
…« Le ciel n’était orné
De grands touffes de feu, les plaines émaillées
N’épandaient leurs odeurs, les bandes écaillées
N’entre-fendaient les flots, des oiseaux les soupirs
N’étaient encor partis sur l’aile des zéphirs ;
Tout était sans beauté »…