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DE L’EMPIRE ROMAIN. CHAP. III.

mations des soldats dont il avait obtenu le consentement par des libéralités excessives, une mort prématurée vint tout à coup arracher de ses bras le nouveau César[1]. Elius Verus laissait un fils ; Adrien le confia à la reconnaissance des Antonins. Ce jeune prince fut adopté par Antonin-le-Pieux, et partagea dans la suite avec Marc-Aurèle la dignité impériale. Parmi tous ses vices, il possédait une seule vertu ; c’était une déférence aveugle pour la sagesse de son collègue : il lui abandonna volontairement les soins pénibles du gouvernement. L’empereur philosophe ferma les yeux sur la conduite de Verus, pleura sa mort, et jeta un voile sur sa mémoire.

Adoption des deux Antonins.

Adrien venait de satisfaire sa passion. Lorsque toutes ses espérances furent évanouies, il résolut de mériter la reconnaissance de la postérité, en plaçant sur le trône de Rome le mérite le plus éminent : son œil pénétrant démêla facilement, dans la foule de ses sujets, un sénateur âgé de cinquante ans environ, dont toute la vie avait été irréprochable, et un jeune homme de dix-sept ans, dont la sagesse annonçait le germe des vertus qui devaient se développer, dans la suite, avec tant d’éclat. Le premier fut déclaré fils et successeur d’Adrien, à condition toutefois qu’il adopterait aussitôt le plus jeune. Et les deux Antonins (car c’est d’eux que nous parlons) gouvernèrent le monde pendant quarante-deux ans avec le même esprit de modération et de sagesse.

  1. Hist. Aug., p. 13 ; Aurel.-Victor, in Epitom.