Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 10.djvu/508

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donnait quelquefois aux navires de guerre plus d’étendue et de solidité ; le soin de combattre et de manœuvrer se divisait alors d’une manière plus régulière entre soixante-dix soldats et deux cent trente matelots. Mais en général ils étaient d’une forme légère et facile à mouvoir ; comme le cap Malée, situé sur la côte du Péloponnèse, conservait toujours son effrayante renommée, une flotte impériale fut transportée par terre l’espace de cinq milles, c’est-à-dire dans toute la largeur de l’isthme de Corinthe[1]. Les principes de la tactique navale n’avaient éprouvé aucun changement depuis Thucydide : une escadre de galères, au moment du combat, s’avançait sous la forme d’un croissant et s’efforçait d’enfoncer ses éperons aigus dans les bordages les plus faibles des navires ennemis. On voyait au-dessus du pont une machine composée de fortes pièces de bois et destinée à lancer des pierres et des dards ; l’abordage se faisait au moyen d’une grue qui élevait et abaissait des paniers remplis d’hommes armés : les diverses positions et le changement des couleurs du pavillon amiral composaient toute la langue des signaux si clairs et si abondans parmi les modernes. Les fanaux de la galère de tête annonçaient au milieu de la nuit les ordres de chasser, de combattre, de s’arrêter, de

  1. Constantin-Porphyrogenète, in vit. Basil., c. 61, p. 185 : il loue modérément ce stratagème comme un βο‌υλην συνετην και σοφην ; mais, troublé par son imagination, il présente la navigation autour du cap du Péloponnèse comme un trajet de mille milles.