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terre ; mais la prière se compose de courtes et ferventes éjaculations, la piété n’est point fatiguée par une ennuyeuse liturgie, et chaque musulman est revêtu, en ce qui a rapport à lui, du caractère sacerdotal. Parmi les théistes, qui rejettent les images, on a cru devoir arrêter les écarts de l’imagination, en dirigeant l’œil et la pensée vers un kebla ou un point visible de l’horizon. Le prophète fut d’abord tenté, pour se rendre agréable aux Juifs, de choisir Jérusalem ; mais bientôt il revint à un penchant plus naturel, et cinq fois le jour les yeux des musulmans établis à Astracan, à Fez et à Delhi, se tournent avec dévotion vers le saint temple de la Mecque. Cependant tous les lieux sont également propres au service de Dieu ; les Mahométans font indifféremment leurs prières dans leur maison ou dans la rue. Pour les distinguer des juifs et des chrétiens, leur législateur a consacré au culte public le vendredi de chaque semaine : le peuple se rassemble dans la mosquée, et l’iman, pour l’ordinaire un respectable vieillard, monte en chaire ; il fait la prière, et ensuite un sermon ; mais la religion musulmane n’a ni prêtres ni sacrifice ; et l’esprit indépendant du fanatisme regarde avec mépris les ministres et les esclaves de la superstition. 2o. Les mortifications volontaires[1] des ascétiques, tourment et gloire de leur

  1. Mahomet (Koran de Sale, c. 9, p. 153) reproche aux chrétiens de se soumettre aux prêtres et aux moines, et d’avoir ainsi d’autres maîtres que Dieu. Maracci (Prodromus, part. III, p. 69, 70) excuse ce culte, surtout relativement