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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 11.djvu/142

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on persuada sans peine à Nicolas II que des amis ne peuvent se brouiller sans se nuire mutuellement ; que les Normands étaient les fidèles défenseurs du saint siége, et que l’alliance d’un prince offrait plus de sûreté que la conduite capricieuse d’un corps aristocratique. Un synode de cent évêques s’assembla à Melphi, et le comte interrompit une entreprise importante pour veiller en personne à la sûreté du pontife romain, et pour exécuter ses décrets. Celui-ci, par reconnaissance et par politique, accorda à Robert et à sa postérité le titre de duc[1], avec l’investiture de la Pouille, de la Calabre et de toutes les terres de l’Italie et de la Sicile qu’il enlèverait aux Grecs schismatiques et aux infidèles Sarrasins[2]. Le consentement du pape pouvait justifier les conquêtes de Robert, mais non pas l’autoriser à disposer d’un peuple libre et vainqueur sans son aveu ; Guiscard ne rendit publique sa nouvelle dignité qu’après avoir

  1. L’histoire de l’acquisition du titre de duc par Robert Guiscard est une matière très-délicate et très-obscure. D’après les remarques judicieuses de Giannone, Muratori et Saint-Marc, j’ai tâché de faire ce récit d’une manière cohérente et vraisemblable.
  2. Baronius (Annal. ecclesiast., A. D. 1059, no 69) a publié l’acte original. Il dit l’avoir copié sur le Liber censuum, manuscrit du Vatican. Cependant Muratori a imprimé (Antiq. med. ævi, t. V, p. 851-908) un Liber censuum où il ne se trouve pas ; et les noms de Vatican et de cardinal éveillent les soupçons d’un protestant et même d’un philosophe.