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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 11.djvu/16

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on les attribuait ; la vraie croix, l’arbre de vie, était dans leur opinion un morceau de bois sain ou pourri ; le corps et le sang de Jésus-Christ, un morceau de pain et une coupe de vin, don de la nature et symbole de la grâce. Ils ôtaient à la mère de Dieu ses honneurs célestes, son immaculée virginité ; ils n’imposaient ni aux saints ni aux anges le soin laborieux d’employer pour eux leur médiation dans le ciel, et de leur donner des secours sur la terre. Dans la pratique ou du moins dans la théorie des sacremens, ils voulaient abolir tous les objets visibles de culte, et les paroles de l’Évangile étaient dans leur opinion le baptême et la communion des fidèles. Ils interprétaient l’Écriture d’une manière assez libre, et lorsque le sens littéral les embarrassait, ils se sauvaient dans les labyrinthes de la figure et de l’allégorie. Il paraît qu’ils mirent beaucoup de soins à rompre la liaison établie entre l’ancien et le nouveau Testament, car le dernier était pour eux le recueil des oracles de Dieu, et ils abhorraient le premier, qu’ils traitaient d’invention fabuleuse et absurde des hommes ou des démons. Nous ne pouvons être surpris qu’ils trouvassent dans l’Évangile le mystère orthodoxe de la Trinité ; mais au lieu de confesser la nature humaine et les souffrances réelles de Jésus-Christ, leur imagination se plaisait à lui créer un corps céleste qui avait traversé celui de la Vierge ainsi que l’eau passe dans un conduit ; et, selon eux, un fantôme crucifié à sa place avait trompé la vaine fureur des Juifs. [Ils adoptaient les deux principes des mages et des manichéens.]Un symbole si simple et si spirituel