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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 11.djvu/38

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avouer ce qu’il a d’obligation à ces intrépides enthousiastes[1]. 1o. Ce sont eux qui ont retranché de l’imposant édifice de la superstition tout ce qui peut être compris depuis l’abus des indulgences jusqu’à l’intercession de la Vierge. Ils ont rendu à la liberté et aux travaux de la vie sociale des myriades de moines et de religieuses ; par eux, une multitude de saints et d’anges, espèces de divinités imparfaites et subordonnées, ont été dépouillés de leur puissance temporelle, et réduits à la céleste béatitude ; leurs images et leurs reliques ont été bannies des églises, et la crédulité du peuple a cessé d’être nourrie par des miracles et des visions journalières. À un culte voisin du paganisme, ils ont substitué un culte spirituel de prières et d’actions de grâces plus digne de l’homme et moins indigne de la Divinité. Il ne reste plus qu’à savoir si cette simplicité sublime est analogue à la dévotion populaire ; si le vulgaire, à qui l’on ôte tous les objets visibles, ne se livrera pas à l’enthousiasme, ou s’il ne tombera pas peu à peu dans la langueur et dans l’indifférence. 2o. La réforme a brisé cette chaîne d’autorités qui empêchent le dévot craintif de penser d’après lui, et l’esclave de dire ce qu’il pense : depuis ce moment, les papes, les pères et les conciles, n’ont plus été les juges suprêmes et infaillibles du monde ;

  1. « Sans Luther et sans moi, disait le fanatique Whiston au philosophe Halley, vous seriez à genoux devant une image de saint Winifred. »