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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 11.djvu/427

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Mecque. Saladin daigna se plaindre et demander une satisfaction qu’il ne désirait pas d’obtenir : on la refusa, et il attaqua immédiatement la Terre-Sainte à la tête d’une armée de quatre-vingt mille hommes. Sa première expédition fut le siége de Tibériade, que lui suggéra le comte de Tripoli à qui cette ville appartenait. Le roi de Jérusalem se laissa persuader d’épuiser ses garnisons, et d’armer son peuple pour secourir cette place[1] importante. Le perfide Raimond fit surprendre les chrétiens dans un camp dépourvu d’eau, et prit la fuite au moment du combat, chargé des malédictions des deux partis[2]. Lusignan fut défait et pris après avoir perdu trente mille hommes ; et la vraie croix, épouvantable malheur ! tomba entre les mains des infidèles. On conduisit dans la tente de Saladin le roi captif, presque mourant de soif et de frayeur. Son vainqueur généreux lui présenta une coupe de sorbet rafraîchi dans de la neige ; mais il ne permit pas que Renaud de Châtillon partageât ce garant de sa clémence et de son hospita-

  1. Templarii ut apes bombabant, et Hospitalarii ut venti stridebant, et barones se exitio offerebant et Turcopoli (les troupes légères des chrétiens), semetipsi in ignem injiciebant (Ispahani de expugnatione Kudsiticâ, p. 18, apud Schultens). Cet essai de l’éloquence des Arabes est un peu différent du style de Xénophon.
  2. Les Latins affirment que Raimond avait trahi les chrétiens, et les Arabes le donnent à entendre ; mais s’il eût embrassé leur religion, les Mahométans l’auraient regardé comme un héros et comme un saint.