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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 12.djvu/203

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son de Souabe, Jean de Procida, qui avait été chassé d’une petite île de ce nom, qu’il possédait dans la baie de Naples. Il descendait d’une famille noble ; mais comme son éducation avait été soignée dans son exil, Jean se tira de l’indigence en pratiquant la médecine, qu’il avait étudiée dans l’école de Salerne. Il ne lui restait plus rien à perdre que la vie, et la première qualité d’un rebelle est de la mépriser. Procida possédait l’art de négocier, de faire valoir ses raisons et de déguiser ses motifs. Dans ses diverses transactions, soit avec des nations, soit avec des particuliers, il savait persuader à tous les partis qu’il ne s’occupait que de leurs intérêts. Les nouveaux états de Charles étaient accablés de toutes espèces de vexations, soit fiscales ou militaires[1]. Il sacrifiait la fortune et la vie de ses sujets italiens à sa propre grandeur et à la licence de ses courtisans ; sa présence contenait la haine des Napolitains ; mais l’administration faible et vicieuse des lieutenans ou des gouverneurs excitait le mépris et l’indignation des Siciliens. Procida ranima par son éloquence le sentiment de la liberté, et fit trouver à chaque baron son intérêt personnel à soutenir la cause commune.

  1. Selon un guelfe zélé, Sabas Malaspina (Hist. de Sicile, l. III, c. 16, dans Muratori, t. VIII, p. 832), les sujets de Charles qui avaient poursuivi Mainfroi comme un loup, le regrettèrent comme un agneau ; et il justifie leur mécontentement par la tyrannie du gouvernement des Français (l. VI, c. 2-7). Voyez le Manifeste sicilien dans Nicolas Specialis (l. I, c. 11, dans Muratori, t. X, p. 930).