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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 12.djvu/28

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règne d’Isaac vit s’élever et tomber plusieurs prétendans à l’empire. Un général qui avait repoussé les flottes de Sicile, fut entraîné à la révolte et à sa perte par l’ingratitude de son souverain ; et le voluptueux repos du prince fut souvent troublé par des émeutes et de secrètes conjurations. Sauvé plusieurs fois par hasard ou par le zèle de ses domestiques, il succomba enfin sous les trames d’un frère ambitieux, qui, pour acquérir la possession précaire d’un trône chancelant, oublia les sentimens de la fidélité, de la nature et de l’affection[1]. Tandis qu’Isaac chassait presque seul dans les vallées de la Thrace, Alix, dans le camp, se revêtit de la pourpre aux acclamations de toute l’armée, La capitale et le clergé souscrivirent à ce choix ; et la vanité du nouveau souverain rejeta le nom de ses pères pour le nom pompeux de la race royale des Comnène. J’ai épuisé toutes les expressions du mépris en parlant de son frère Isaac ; et j’ajouterai seulement que l’indigne Alexis[2] ne se soutint durant un règne de huit ans que par les vices plus mâles de son épouse Euphrosine. Isaac n’apprit sa chute qu’en se voyant poursuivi en ennemi par ses gardes infidèles. Il courut en fuyant devant eux

  1. Les Latins aggravent l’ingratitude d’Alexis, en supposant que son frère Isaac l’avait délivré des mains des Turcs qui le tenaient en captivité. On a sans doute affirmé ce conte pathétique à Venise et à Zara, mais je n’en trouve aucune trace dans les historiens grecs.
  2. Voyez le règne d’Alexis Lange ou Comnène dans les trois livres de Nicétas, p. 291-352.