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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 12.djvu/356

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la ressemblance de leurs caractères. Dans la carrière de la victoire, Timour ne voulait point souffrir d’égal, et Bajazet ne connaissait point de supérieur. La première lettre de l’empereur mongoul[1] était propre à irriter plutôt qu’à adoucir le sultan des Turcs, dont il affectait de mépriser la famille et la nation[2]. « Ne sais-tu pas qui la plus grande partie de l’Asie conquise par nos armes obéit à nos lois ; que nos forces invincibles s’étendent d’une mer à l’autre ; que les potentats de la terre sont rangés en haie devant notre porte, et que nous avons forcé la fortune elle-même à veiller sur la prospérité de notre empire ? Sur quoi fondes-tu ton insolence et ta folie ? Tu as gagné quelques batailles dans les forêts de l’Anatolie ; méprisables trophées ! Tu as remporté quelques victoires sur les chrétiens d’Europe ; mais ton épée était bénie par l’apôtre de Dieu, et l’obéissance que tu as montrée aux préceptes du Koran,

  1. Nous avons trois différentes copies de ces lettres menaçantes dans les Institutions (p. 147), dans Sherefeddin (l. v. c. 14), et dans Arabshah (t. II, c. 19, p. 183-201), qui s’accordent plus pour la substance que pour le style. Il y a apparence qu’elles ont été traduites avec plus ou moins de liberté du turc en langue arabe et en langue persane.
  2. L’émir mongoul se donne à lui-même et à ses compatriotes le nom de Turcs, et rabaisse Bajazet et sa nation au nom moins honorable de Turcomans. Cependant, je ne conçois pas comment les Ottomans pouvaient tirer leur origine d’un matelot turcoman. Ces pâtres habitaient bien loin de la mer et de toute affaire maritime.