Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 13.djvu/164

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ses fureurs des Romains, les insultes, les outrages et les craintes auxquelles sa personne et son clergé se trouvaient continuellement exposés ; les funestes effets de l’hérésie d’Arnaud, qui tendait à renverser tous les principes de la subordination civile et ecclésiastique. Frédéric se laissa persuader par ces raisons ou séduire par le désir de la couronne impériale. Dans les calculs de l’ambition, l’innocence ou la vie d’un individu sont des intérêts de bien peu d’importance, et ils immolèrent leur ennemi commun à une réconciliation momentanée. Arnaud, depuis sa retraite de Rome, vivait sous la protection des vicomtes de la Campanie ; l’empereur usa de son pouvoir pour s’en rendre maître ; le préfet de la ville prononça son arrêt ; le martyr de la liberté fut brûlé vif sous les yeux d’un peuple ingrat et indifférent ; [Son exécution. A. D. 1155.]et on jeta ses cendres dans le Tibre, de peur que les hérétiques ne fissent de ses reliques un objet de vénération[1]. Le clergé triomphait : la secte de l’hérésiarque fut dispersée avec ses cendres ; mais sa mémoire vivait encore dans l’esprit des Romains. Vraisemblablement ils avaient tiré de son école ce nouvel article de foi, que la métropole de l’Église catholique n’est pas soumise aux peines de l’excommunication et de l’interdit. Les papes pouvaient répondre que la juridiction suprême qu’ils exerçaient

  1. Outre l’historien et le poète que j’ai déjà cités, le biographe d’Adrien IV raconte les dernières aventures d’Arnaud (Muratori, Scriptor. rerum italicar., t. III, part. I, p. 441, 442).