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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 13.djvu/234

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en cap, et ayant autour de lui les cent conjurés. Le vicaire du pape, simple évêque d’Orviète, qu’on avait déterminé à jouer un rôle dans cette singulière cérémonie, marchait à la droite de Rienzi, devant lequel on portait trois étendards, emblèmes des desseins des conjurés. Le premier, qu’on nommait la bannière de la liberté, représentait Rome assise sur deux lions, et tenant d’une main une palme, et de l’autre un globe ; sur celui de la justice, on voyait saint Paul, l’épée nue à la main ; et sur le troisième, saint Pierre avec les clefs de la concorde et de la paix. Rienzi était encouragé par les applaudissemens d’une foule innombrable qui comprenait peu de chose à tout cet appareil, mais qui formait de grandes espérances : la procession se rendit lentement du château Saint-Ange au Capitole. Le sentiment de son triomphe fut troublé par de secrètes émotions qu’il s’efforça de supprimer ; il monta sans obstacle et avec une apparente confiance dans la citadelle de la république ; et du haut du balcon il harangua le peuple, qui confirma ses actes et ses lois de la manière la plus flatteuse. Les nobles, comme s’ils eussent été dépourvus d’armes et de moyens de prendre un parti, demeuraient consternés et en silence, témoins de cette étrange révolution ; on avait eu soin de choisir le moment où Étienne Colonne, le plus redoutable d’entre eux, ne se trouvait pas à Rome. À la première rumeur il revint dans son palais ; il affecta de mépriser cette émeute populaire, et déclara au député de Rienzi, que, lorsqu’il en aurait le loisir, il