Aller au contenu

Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 13.djvu/25

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

aurait fallu l’impulsion d’une main ferme et vigoureuse, et le faible Frédéric III ne jouissait ni de l’influence d’un empereur, ni d’aucune considération personnelle. Une longue guerre avait diminué les forces de la France et de l’Angleterre sans épuiser leur animosité[1]. Mais le duc de Bourgogne, prince vain et fastueux, se fit, sans danger et sans frais, un mérite de l’aventureuse piété de ses sujets, qui firent voile sur une flotte bien équipée des côtes de la Flandre vers celles de l’Hellespont. Les républiques de Gênes et de Venise, plus à portée du théâtre de la guerre, réunirent leurs flottes sous l’étendard de saint Pierre. Les royaumes de Pologne et de de Hongrie, qui couvraient, pour ainsi dire, les barrières intérieures de l’Église latine, étaient les plus intéressés à s’opposer aux progrès des Turcs. Les armes étaient le patrimoine des Scythes et des Sarmates et ces nations paraissaient propres à soutenir la lutte, si elles eussent dirigé contre l’ennemi commun les forces militaires qui s’entre-détruisaient dans leurs discordes civiles. Mais le même esprit les rendait également incapables d’accord et d’obéissance. Le pays était trop pauvre et le monarque trop peu puissant pour entretenir une armée régulière ; les corps irréguliers de cavalerie hongroise et polonaise manquaient des armes et des sentimens qui, en quelques

  1. Ce ne fut qu’en 1444 que la France et l’Angleterre convinrent d’une trève de quelques mois. (Voy. les Fœdera de Rymer et les Chroniques des deux nations.)