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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 13.djvu/252

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tinée, La grande salle du Capitole destinée à ce sanglant spectacle était tapissée de rouge et de blanc. La physionomie du tribun était sombre et sévère, les bourreaux avaient le glaive à la main, et le son des trompettes interrompit les barons, qui voulurent adresser un discours à l’assemblée ; mais, dans ce moment décisif, Rienzi n’était pas moins agile et moins inquiet que ses captifs ; il craignait l’éclat de leur nom, leur famille, l’inconstance du peuple et les reproches du monde entier ; après les avoir imprudemment offensés par une mortelle injure, il conçut le vain espoir, en pardonnant, d’obtenir pardon à son tour, et prononça un discours travaillé, dans le ton d’un chrétien et d’un suppliant ; comme l’humble ministre des communes, il pria ses maîtres de faire grâce à ces nobles criminels, engageant sa foi et son autorité pour garant de leur repentir et de leur bonne conduite à l’avenir. « Si la clémence des Romains vous fait grâce, leur dit le tribun, ne promettez-vous pas de consacrer votre vie et votre fortune à la défense au bon état ? » Les barons, étonnés de cette inconcevable clémence, répondirent par une inclination de tête ; et tandis qu’ils renouvelèrent leur serment de fidélité, ils formèrent peut-être en secret le vœu plus sincère de se livrer à la vengeance[1]. Un prêtre prononça leur absolution au

  1. La lettre où Rienzi justifie sa conduite envers les Colonne (Hocsemius, apud du Cerceau, p. 222-229), découvre au naturel un fripon à la fois et un fou.