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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 13.djvu/299

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La majesté locale de Rome, le souvenir de ses consuls et de ses triomphes, semblent ajouter une nouvelle amertume au sentiment et à la honte de sa servitude. En calculant de sang-froid les avantages et les défauts du gouvernement ecclésiastique, on peut le louer dans son état actuel comme une administration douce, décente et paisible, qui n’a pas à craindre les dangers d’une minorité ou la fougue d’un jeune prince, qui n’est point minée par le luxe, et qui est affranchie des malheurs de la guerre ; mais ces avantages se trouvent contrebalancés par ces avénemens fréquens et renouvelés presque tous les sept ans, de souverains, rarement originaires de Rome, jeunes politiques de soixante ans, parvenus au déclin de leur vie et de leurs talens, sans espoir de vivre assez long-temps pour achever les travaux de leur règne passager et sans enfant pour les continuer. On tire le pontife du sein de l’Église et même du fond des couvens, des habitudes de l’éducation et de l’existence les plus contraires à la raison, à l’humanité et à la liberté. Enchaîné dans les filets d’une croyance servile, il a appris à croire en raison de l’absurdité, à respecter ce qui est méprisable et à mépriser ce qui est digne de l’estime de tous les êtres raisonnables ; à punir l’erreur comme un crime, à célébrer la mortification de la chair et le célibat comme la première des vertus, à mettre les saints du calen-

    ner le nom de prince ou de prélat, puisque le caractère de magistrat temporel prédomine toujours.